Difficile de cerner cette valeur cardinale et inaliénable partagée par toutes les professions libérales règlementées : l’indépendance professionnelle.

Elle repose sur de multiples paramètres dont la pertinence est remise en question par les évolutions socio-économiques actuelles :  niveau de formation initiale requis pour exercer (expression d’une compétence et d’une expertise reconnue institutionnellement par
un diplôme d’État et une inscription à un Ordre professionnel engageant déontologie et responsabilité ordinale) et articulation de l’indépendance des professionnels avec les tiers actionnaires financiers des sociétés d’exercice dont la capacité d’influence n’est évidemment pas neutre.

Le marché des services professionnels auquel appartiennent les professions libérales de santé constitue un secteur clé de l’économie assurant une mission de santé publique. Il se caractérise par un niveau élevé de réglementation, autant sur le plan de la régulation par l’empilement de règles législatives que de l’autoréglementation (respect de la déontologie) par les différents corps de métier via leurs Ordres professionnels. Depuis les années 2000, la France a été largement encouragée par des acteurs publics et privés à mener une réflexion sur les possibilités d’ouverture de ce marché intérieur à la concurrence (rapport Kok (2004), rapport Attali (2008)). En substance, démanteler ces marchés protégés pour ne pas entraver l’activité économique au sein du marché européen unique, avec la promesse d’une baisse des coûts associés à ces services. Sans légiférer de façon agressive par une déréglementation totale, la France a néanmoins largement toléré la main mise de fonds d’investissement sur le secteur des cliniques privés, des laboratoires de biologie médicale et des EHPAD depuis une quinzaine d’années. En 2022, le scandale ORPEA illustre avec une profonde acuité les dérives portées par la financiarisation extrême de ces structures. Les autorités semblent découvrir que la nature intrinsèque de leur projet économique avant tout lucratif, peut s’éloigner drastiquement des impératifs incombant à une mission de service publique, sans qu’aucune autorégulation interne n’ait pu s’y opposer.

Suite à la parution du rapport LAVENIR sur les professions libérales, la DGE (direction générale des entreprises), travaille depuis quelques mois, sous l’égide du ministère de l’économie, des finances et de la relance, à un projet d’ordonnance relative à l’exercice en société des professions libérales réglementées. Cette Ordonnance a pour ambition de consacrer l’indépendance des professionnels de santé exerçant en Société d’exercice libéral (SEL), écrasant les dispositions de la loi de 1990, 2001 et 2004 les concernant.

Au total, 16 Ordres professionnels représentant chaque profession ont été invités à participer à la réflexion autour de ce projet d’Ordonnance (notaire, huissiers, expert comptable, architectes, géomètres, commissaires-priseurs, commissaires de justice et professions de santé, vétérinaires, dentistes, … et biologistes médicaux, dont le modèle « tout financier » apparait aux yeux des parties prenantes comme un contre modèle à éviter absolument).

Définition de l’indépendance professionnelle

En premier lieu, il faut rappeler ce que recouvre la notion de professions libérales réglementées en France. Il s’agit de personnes exerçant en toute indépendance et sous leur responsabilité personnelle, une activité soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, consistant en la fourniture de prestations principalement intellectuelles, techniques ou de soins au moyen de qualifications ou compétences professionnelles appropriées, dans le respect de principes éthiques ou d’une déontologie professionnelle, dans l’intérêt du client, du patient ou du public (Article 29 de la loi 2012-387 du 22 mars 2012).

A cette fin, chaque profession libérale réglementée dispose d’un Ordre professionnel ou d’un organe représentatif.  Les ordres professionnels, compétents pour une profession libérale réglementée donnée, contrôlent les qualifications et les compétences du professionnel et sanctionnent ses manquements aux règles déontologiques. Ils veillent à garantir les conditions et les modalités d’exercice et à promouvoir des principes déontologiques visant à préserver la qualité de service ou de soin.

L’indépendance est un devoir pour le professionnel libéral réglementé visant à garantir sa qualité de service dans l’intérêt du client, du patient ou du public et se caractérisant par sa capacité à prendre des décisions professionnelles conformes aux lois et règlements, à son libre arbitre et aux principes déontologiques dont il relève.

Elles ont donc une mission d’intérêt général et sont protégées à ce titre, ne devant être dévoyées par des intérêts purement lucratifs.

Elle suppose donc une absence de lien de subordination et implique que le professionnel se prémunisse de tout conflit d’intérêts, tant en matière décisionnelle qu’en matière économique ou financière. 

L’Ordre des pharmaciens consacre un dossier entier de 44 pages au sujet de l’indépendance professionnelle des pharmaciens avec quelques éléments de jurisprudence dans le secteur particulièrement complexe de la biologie médicale.

Au cours des différentes auditions liées au projet d’Ordonnance, l’unanimité a été recueillie consacrant l’absence de volonté d’ouverture du capital aux investisseurs extérieurs. Néanmoins, des observateurs attentifs remarqueront que les lignes de l’anatomo-pathologie, radiologie et vétérinaires bougent objectivement depuis quelques années avec la constitution de structures dans lesquelles des non professionnels détiennent la majorité du capital.

L’article 52 du projet d’Ordonnance

Mais rentrons dans le vif du sujet avec l’explosif article 52 du projet d’Ordonnance cristallisant les vives inquiétudes de certains opérateurs privés exploitant des sociétés de laboratoires de biologie médicale médicaux, qui seraient entravés dans l’exploitation de leur montages financiers, mais également certains biologistes médicaux, ayant été contraints d’avoir recours aux actions de préférence ou actions à dividende prioritaire pour le rachat de parts sociales dans le cadre de leur exercice. En effet, le texte de loi propose de dynamiter ni plus ni moins le principe et l’intérêt du démembrement de parts sociales. Il propose d’abord que les actions de préférence soient réservées aux personnes exerçant la profession constituant l’objet social de la société mais aussi d’interdire la détention des actions à dividende prioritaire sans droit de vote aux associés en exercice (les actions de préférence ne pourraient donc plus faire obstacle à l’application des règles de répartition du capital et des droits de vote, autrement dit : un financier ou un biologiste ne pourrait plus recevoir des dividendes doubles liées à la possession de ce type d’action, remettant en question tout le montage financier de leur rachat de part).

Deuxième grand principe, pour renforcer l’indépendance des professionnels, les droits de vote doubles ou droits particuliers (assortis à ces actions de préférence) dont les titulaires ne sont pas des personnes exerçant la profession sont sans effet lors des délibérations portant sur les sujets énoncés par décret ni à l’application des règles de répartition du capital et des droits de vote. Autrement dit, un financier n’aurait plus voix au chapitre des décisions majeures dans les orientations de la société qu’il détient…

Comme solution de sortie, le texte prévoit la possibilité de rachat par la société des actions de préférence, avec ou sans droit de vote, assorties de droits particuliers de toute nature, à titre temporaire ou permanent.

Définition des actions de préférence

Au sein d’une SEL, il est possible d’attribuer à certains associés des actions de préférence leur permettant de bénéficier de droits et de prérogatives spécifiques qui les distinguent des actions ordinaires. Un titre ordinaire confère normalement aux actionnaires un droit de vote aux assemblées et un droit aux dividendes proportionnel à la quantité de titre possédée. Une action de préférence permet de déroger à ces principes en octroyant à ces titres des droits différents, initialement, lors de la création d’une société ou par un mécanisme de conversion d’actions ordinaires en action de préférence.

Celles -ci peuvent conférer :

  • des droits politiques distincts : droit de vote doubles ou multiples qui affectent à l’associé un poids plus grand en assemblée,
  • des actions de préférence sans droit de vote (dont les fonds d’investissement sont friands, notamment dans les montages LBO, car les fonds souhaitent uniquement percevoir des dividendes sans participer à la vie de la société)
  • des droits financiers : actions avec dividende prioritaire permettant à l’associé de percevoir des dividendes prioritairement aux autres associés.

Les actions de préférence permettent par conséquent d’ouvrir le capital social d’une société à des investisseurs tout en permettant aux actionnaires initiaux de conserver le contrôle de la société.

Pour en savoir plus sur le fonctionnement et typologie des parts sociales ou titres émis par les différents types de SEL, la lecture de cet article vous aidera à y voir plus clair.

D’autres subtilités existent et sont répertoriées dans cet article (droit de rachat prioritaire, droit au remboursement prioritaire, droit de céder des actions en dehors de toute procédure d’agrément ou de préemption… avec quelques garde fous comme l’interdiction des pactes léonins, consistant à priver un actionnaire de tout droit au bénéfice, ou encore l’interdiction de distribuer des dividendes en l’absence de bénéfice distribuable…)

L’empire du marché de l’analyse médicale a été édifié en un temps record à coup de montages juridiques et financiers extrêmement complexes. La régulation, chère aux autorités publiques, repose aujourd’hui essentiellement sur les autorisations de fusion absorption, confiées aux fonctionnaires de l’ARS, bureau d’enregistrement parfaitement impuissant face aux empilements de holding régissant la détention capitalistique des laboratoires d’analyses médicales français. En bout de chaine, l’Autorité de la Concurrence, pour laquelle 2 ou 3 grands opérateurs financiers est une condition suffisante (voire nécessaire). Les Ordres et syndicats professionnels font de leur côté bonne figure dans le renoncement, chaque acte de résistance ayant été réprimé à coup de frais de justice exorbitant, d’amende et perquisition abusive ou de nuits blanches.

Aux dernières nouvelles, cet article concernant les droits financiers, parfaitement subversif, a été supprimé au motif qu’elle n’entrerait pas ou plus dans le cadre de l’habilitation de l’Ordonnance.

Toute relation avec l’intervention d’un cabinet d’avocat très réputé mandaté par Eurofins, Cerba ou Inovie, usant des actions de préférence pour leur ingénierie financière, serait complètement fortuite. La crainte d’un contentieux vis-à-vis du droit européen a également été agité comme chiffon rouge.

Enterré, sans plus de discussion ni communication, en dehors de quelques échanges passionnés entre biologistes sur leur propres montages financiers personnels, au sein de groupes rachetés par des fonds via LBO, ou indépendants, nécessaire à la validation de l’emprunt bancaire destinée à racheter les parts « au prix du marché » à une génération bien cavalière de biologistes médicaux.

L’essence même de ce projet de loi ne représente t’il pourtant pas une formidable fenêtre d’opportunité pour définir et garantir l’indépendance de professionnels de santé libéraux dans des sociétés aujourd’hui en situation monopolistique dont la conduite opérationnelle induit une véritable distorsion de concurrence entre elles et les biologistes entrants, impossible d’acquérir des parts sociales significatives et de facto une indépendance garantit statutairement. Diminuer l’attractivité du secteur aux yeux des opérateurs financiers par ce biais semble être l’unique option viable à ce jour.

La biologie médicale est une profession souffrant d’un manque de reconnaissance et de visibilité, avec un faible effectif de professionnels diplômés, à cheval sur deux disciplines médicales, médecine et pharmacie. Longtemps ostracisée parmi les autres secteurs de la santé, la situation de la biologie médicale aujourd’hui inquiète et est citée en contre modèle par plusieurs organisations dont le syndicat Avenir Spé, représentant les médecins spécialistes multipliant depuis le début de l’année les prises de position (news 37 et news 38) sur la nécessité de se structurer face à la financiarisation mercantile de la santé, faisant écho à la récente campagne du réseau « Les biologistes indépendants » sur la même thématique, très relayée médiatiquement.

Dans un communiqué d’octobre 2021, les « Les Libéraux de Santé« , nouvelle structure interprofessionnelle fondée en 2021 par 11 syndicats représentatifs de professionnels de santé parmi lesquels le SDB (Syndicat des Biologistes) avec son président François Blanchecotte comme 1er VP, la CSMF Confédération des syndicats médicaux français, le SML (syndicat des médecins libéraux), la FNI (fédération nationale des infirmiers), la Fédération des Syndicats Pharmaceutiques de France, la FFMKR, (Fédération française des masseurs-kinésithérapeutes rééducateurs)… se mobilisent ensemble il est temps… sur la mise en danger de l’exercice libéral au travers de « l’ouverture du capital à des non exerçants comme un risque majeur pour l’indépendance des professionnels libéraux de santé ». Ils annoncent partager une même vision et des valeurs communes : indépendance et liberté d’exercice, responsabilité, solidarité et attachement au système conventionnel.

« Les évolutions réglementaires dans le domaine de la santé, mais aussi l’exemple de la transformation des cliniques privées, des centres de santé, des Ehpad, des laboratoires d’analyses, pour lesquels l’actionnariat de groupes financiers a été favorisé, constituent un avertissement à ne pas négliger. Sous la pression des grands groupes et fonds de pension étrangers, un vaste mouvement de concentration a été engagé, et les professionnels qui y exercent ont perdu la maîtrise de leurs outils de travail. Au-delà des risques de remise en cause de la qualité du système de santé français et de l’affaiblissement du maillage territorial, la financiarisation envisagée par le Gouvernement et son corollaire l’industrialisation de la santé, l’ouverture du capital des sociétés d’exercice libéral (SEL) aux investisseurs non professionnels conduirait à une perte d’indépendance professionnelle incompatible avec la nature des prestations proposées. La marchandisation et l’industrialisation sont dangereuses pour le patient. L’affaire des centres PROXIDENTAIRE, est venue le rappeler récemment. En conclusion, « les Libéraux de Santé, réclament que les professions de santé soient exclues du champ d’application de l’article 6 de ce projet de loi habilitant le gouvernement à prendre, par voie d’ordonnance, des dispositions visant à « faciliter le développement et le financement des structures d’exercice des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé. »

L’Ordre des vétérinaires a de son côté consacré une journée entière de son congrès de Saint-Malo de décembre 2021 à l’indépendance professionnelle de ses professionnels vétérinaires.

La profession de vétérinaire relève depuis 2010 de la directive « service » de l’UE (Directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur) visant à mettre en œuvre le principe européen de libre circulation des services sur le marché européen en interdisant toute restriction injustifiée à l’exercice de ces libertés. Directive à laquelle la biologie médicale a échappé de justesse en 2007.  L’Ordre des vétérinaires définit l’indépendance professionnelle comme la condition de base nécessaire pour maintenir une relation de confiance dans l’asymétrie d’une relation d’information entre « sachants » et « non sachants », entre l’État et les vétérinaires, entre les clients et les vétérinaires et, enfin, au sein même de la profession vétérinaire, ne laissant la place au doute sur la qualité des prestations fournies, quel que soit le mode d’exercice.

Pourtant le vétérinaire, comme le biologiste, n’est donc pas hors de toute dépendance ou de tout cercle d’influence, il évolue dans une relation d’influence permanente entre les acteurs politiques et institutionnels, les acteurs de l’industrie du diagnostic, ses prestataires de services, son Ordre, son ministère de tutelle, ses syndicats voire même son organisme bancaire… La profession dépend de tous ces acteurs et secteurs pour fonctionner, s’approvisionner, être autorisée à exercer, se former, se financer. Comment définir alors cette indépendance si essentielle, serait-ce la capacité de pouvoir assumer sa pleine responsabilité, par ailleurs légale et ordinale, la possibilité de pouvoir faire des choix professionnels en toute impartialité, sans se laisser influencer par des pressions extérieures étrangères à l’impératif général de santé publique ou par ses intérêts propres ? Elle s’entendrait alors comme un moyen permettant de neutraliser l’influence potentielle d’un tiers ou de son propre intérêt personnel.

Concrètement, un exercice vétérinaire indépendant nécessiterait que la société d’exercice soit in fine contrôlée par des vétérinaires effectivement, réellement et concrètement en exercice en son sein. Ces dirigeants vétérinaires peuvent ainsi privilégier, à travers leur direction à court, moyen ou long terme, les intérêts de la santé animale, de la santé publique et de leurs clients, avant même leurs propres intérêts ou les intérêts d’un tiers, quand bien même ce tiers est un actionnaire minoritaire de la société d’exercice

Aujourd’hui, la question de l’indépendance des professionnels de santé exerçant dans des sociétés d’exercice détenus par des tiers financiers est partagée par de multiples professions d’intérêt général et est clairement posée dans ce projet d’Ordonnance. On constate encore une fois que l’enfer est pavé de bonnes intentions. Les intérêts financiers en jeu vont de nouveau faire échouer toute tentative de redonner un réel pouvoir décisionnel et de direction aux professionnels en exercice. Le gouvernement tient pour responsables les biologistes « vendeurs » de la situation actuelle et les financiers comme un mal nécessaire. Mais il craint de toute évidence à terme une fragilisation des impératifs de santé publique dans l’organisation des soins et cherche à réintroduire des mesures protectionnistes.

Quelles solutions complémentaires pourraient être envisagées ?

Inspirée des Benefit Corporations nées aux Etats-Unis, le principe « d’entreprise à mission » commence à émerger en France, notamment dans la très médiatique affaire « Orpéa » (Le géant des Ehpad Orpea deviendra-t-il une entreprise à mission, comme le suggère son actionnaire Natixis ?)

L’entreprise « à mission », une entreprise lucrative mais vertueuse ?

Devinant les risques inhérents à la financiarisation de pans entiers de notre économie de service depuis les années 2000, le concept de l’entreprise à mission est né en mars 2018 dans le rapport Notat-Senard, matérialisant les réflexions du groupe « entreprise et intérêt général ». Cette notion a été retranscrite dans le droit national au travers de la loi Pacte dès octobre 2019, qui encourage la transformation de l’entreprise. Depuis plus de deux siècles, l’entreprise était « gérée dans l’intérêt commun des associés », associés qui au passage avaient pignon sur rue et n’était pas des fonds d’investissement internationaux au capital fluctuant… Afin d’y faire face, ce « label » juridiquement opposable propose à une entreprise d’intégrer à ses statuts un sens d’intérêt général pour la société, des enjeux sociaux et environnementaux, à l’opposé d’un modèle économique qui ne serait que lucratif ou simplement commercial de vente de services au profit de clients, capables de faire passer les intérêts de ses parties prenantes avant celles de ses actionnaires, ambition annoncée et gage absolu d’indépendance.

Elle est invitée à se doter d’une « raison d’être » qui exprime ainsi sa finalité au-delà des objectifs économiques, la responsabilité de l’entreprise ne pouvant se limiter à accumuler les profits. En effet, le rapport initial faisait le constat clair que l’entreprise inspirait de la méfiance à une part croissante de la population, en raison « d’une certaine dictature du court terme et des résultats financiers ». Ces entreprises s’engagent statutairement à prioriser les parties prenantes (clients, salariés, fournisseurs) avant la rémunération à court terme des actionnaires, dans un engagement sincère et en y affectant des moyens financiers.

« La raison d’être avant la raison d’avoir », réalité ou méthode Coué ?

Afin d’évaluer si le changement de statut s’accompagne d’un réel engagement sociétal, la loi impose des modalités de contrôle : en interne, par un « comité de mission » distinct des organes sociaux, comprenant au moins…. un salarié mais également en externe via un organisme tiers indépendant. Il doit être choisi parmi les organismes accrédités à cet effet par le Cofrac ou équivalents européens. Cet organisme de contrôle réalise sa première vérification dans les 18 à 24 mois suivant la déclaration de la qualité de société à mission et procède aux suivantes, au moins tous les 2 ans. En cas de non atteinte des objectifs, quiconque peut engager une procédure de retrait de la qualité de société à mission.

Notre propre COFRAC qui, lui, nous contrôle en direct a inventé un concept s’en approchant vaguement. Le non-respect d’un point de la norme lorsque « la charte éthique du laboratoire ne précise pas que le personnel travaille sans pression ni conflits d’intérêts » fait désormais l’objet d’un écart. Selon les préceptes normatifs, il suffit simplement d’écrire l’indépendance pour la voir de facto garantie.

Rappelons que le recours croissant à l’accréditation assure aux pouvoirs publics que sont correctement mises en œuvre, maintenues, voire renforcées, la protection de la santé et de l’environnement, la sécurité des biens et des personnes, la lutte contre la fraude, l’équité des marchés et la confiance de la population pour les services et produits qu’elle utilise.

L’accréditation permet en quelque sorte aux pouvoirs publics de déléguer en confiance des activités de contrôle de conformité à des organismes privés ou de simplifier les contraintes réglementaires régulant l’activité économique. C’est aussi une solution adaptée pour optimiser les dépenses publiques tout en maintenant la qualité des services et l’efficience des politiques publiques.

Dans un contexte global de réduction des dépenses publiques et de recentrage des États sur leurs missions régaliennes, l’accréditation s’est imposée comme un des moyens les plus appropriés et les plus utilisés par les pouvoirs publics dans nombre de pays.

En mai 2021, la France comptait 166 entreprises à mission, les deux tiers étant des PME. Les plus grandes entreprises engagées dans la démarche sont Danone, Carrefour, Michelin, Volvic, Blédina, la Camif, la Maif, Yves Rocher, Aigle… mais aussi le Crédit Agricole ou encore Axa.

Débats autour de la viabilité du modèle face aux pressions financières

L’exemple de Danone, première grande entreprise du CAC40 à franchir le pas en juin 2020 et à se donner comme mission statutaire d’apporter « la santé par l’alimentation au plus grand nombre » est à ce titre informatif. Ce nouveau statut n’a pas empêché un vaste plan social l’année qui a suivi, ni le licenciement de son PDG, Emmanuel Faber, survenue en mars 2021 sous la pression de fonds activistes américains récemment entrés au capital et jugé comme responsable des mauvaises performances de l’entreprise par rapport à ses concurrents. Suite à son éviction, de nombreux commentateurs médiatiques avaient critiqué le choix d’Emmanuel Faber d’avoir voulu conjuguer les objectifs sociaux aux objectifs de rentabilité, remettant en question le principe même du fondement de ce nouveau statut. Georg Wernicke, professeur assistant à HEC Paris a défendu de son côté la thèse que l’affichage ostensible d’objectifs sociaux et environnementaux ait pu avoir eu l’effet paradoxal d’attirer des fonds spéculatifs agressifs, ces derniers ayant pu faire le pari d’un retour sur investissement facile et rapide en cas de renoncement à ces objectifs et identifiés comme coûteux (source).

Le statut de société « à mission » ne signifie donc pas la poursuite d’un projet d’entreprise qui serait complètement dégagé de la contrainte de maximisation de création de valeur pour l’actionnaire…

Vient ensuite la proposition de G. Giraud, qui, pour garantir un équilibre du pouvoir entre les salariés et les actionnaires, souhaiterait la création d’un statut de « Société à gouvernance partagée » qui introduirait de la bonne gouvernance sociale, par exemple en permettant aux parties prenantes de siéger, à parité, dans le Conseil d’administration ou Comité de direction. Ces parties prenantes seraient 1) les représentants des employés, 2) les représentants des actionnaires, et 3) les représentants de la société civile et autres parties prenantes entourant l’entreprise dans le projet qui lui donne sens.

L’enjeu est d’offrir des garanties de responsabilités aux consommateurs, aux collaborateurs et aux parties prenantes, prioritaires par rapport aux exigences des actionnaires, dans le but de co-construire une relation de confiance, et, dans le cas des sociétés de santé, permettre de créer un climat favorable à l’exercice en toute indépendance des professionnels en exercice.

D’autres propositions pourraient venir compléter ce nouvel élan

  • Encadrer les contrats de travail exerçant dans une société d’exercice dans laquelle des tiers investisseurs prennent des parts. Une clause relative à l’indépendance et au respect de la déontologie exigée et vérifiée par l’Ordre d’appartenance, la clause de non concurrence devra être proportionnée aux objectifs poursuivis
  • Donner les moyens aux Ordre de contrôler des règles sur l’actionnariat des sociétés d’exercice et sur les modalités de gouvernance
  • Interdire explicitement une rémunération ou toute clause financière basées
    « sur des normes ou des objectifs de productivité »
  • Mise en place d’une instance de contrôle de l’indépendance adaptée et
    efficace sous l’égide des Ordres professionnels permettant de détecter ou de prévenir précocement des situations à risque de conflits d’intérêts. Une grille d’audit pourrait être construite et servir de base à la mise en place d’actions correctives avant un nouvel audit de contrôle. Ces contrôles pourraient devenir systématiques lors des changements d’actionnaires, puis être répétés, par exemple tous les trois à cinq ans, selon la taille de la structure et les risques de perte d’indépendance comme l’appartenance à un grand groupe.
  • Procédure d’alerte : faciliter la déclaration de litiges à l’Ordre et l’ARS et protection de l’employé et de son anonymat pour encourager la vigilance et les déclarations d’éventuelles atteintes à l’indépendance ou problème ayant trait à la Santé publique (principe de surveillance passive)

Une situation, rapportée par la section G, illustre bien cette problématique. Suite à des dysfonctionnements constatés dans l’organisation interne du Laboratoire de biologie médicale (LBM) dans lequel il était salarié, un pharmacien biologiste avait alerté la direction de la société exploitant le LBM. Étaient notamment dénoncés : le remplacement du biologiste responsable par un biologiste médical non inscrit à l’Ordre, l’absence de fiche de non-conformité, l’utilisation d’un code utilisateur fictif sur le système informatique du laboratoire, l’absence de validation biologique par un biologiste, des défaillances en termes d’assurance qualité… Aucune réponse n’ayant été apportée au pharmacien biologiste, ce dernier a informé le DG de l’ARS compétente, conformément à l’article L 6213-11 du CSP. Une enquête a été diligentée au sein du laboratoire laissant apparaître de nombreux dysfonctionnements. Néanmoins, la direction de la société exploitant le LBM a ensuite menacé le pharmacien à l’origine de ce signalement de licenciement pour faute grave s’il refusait une rupture conventionnelle (source Ordre des pharmaciens).

  • Clause de cession : lors d’un rachat d’un laboratoire par un tiers investisseur non soumis au code de déontologie, possibilité de sortie facilitée jusqu’à 3 ans après la vente.

Au terme cet article apparait une évidence.  Il existe des difficultés concrètes à préserver l’indépendance de professionnels de santé tenus par une déontologie lorsqu’il est parfaitement légal de détourner l’esprit de l’exercice libéral prévu dans le cadre de SEL, notamment en dissociant le capital et les droits de vote, au regard des exigences de sauvegarde de la santé publique.

L’ordonnance du 13 janvier 2010 relative à la biologie médicale a tenté de concilier liberté d’entreprendre et protection des droits des patients. Il y est écrit que les laboratoires de biologie médicale sont dirigés par un biologiste responsable, disposant d’une complète indépendance professionnelle et d’un droit d’alerte auprès du directeur général de l’Agence régionale de la santé. Il suffisait visiblement de l’écrire.

10 ans plus tard. 70% du capital de la biologie médicale est capitalisé en bourse ou détenu par des fonds d’investissement, le plus souvent étranger, avec 4 à 5 grands opérateurs. Une réussite. Non seulement l’Etat risque de devoir batailler ferme pour poursuivre les baisses de tarification, mais il s’expose à un risque de perte de contrôle en termes d’engagement de ses professionnels de santé, comme dans d’autres secteurs de santé, de couverture du territoire sur le plan de l’offre de biologie, remplacée bientôt par des automates de biologie médicale délocalisée pilotée à distance, une biologie intrinsèquement plus onéreuse et de qualité inférieure. La taille des acteurs en situation monopolistique dans plusieurs régions pose également problème si le pilotage de ces groupes venait à donner la priorité à la performance financière. Enfin, dans un contexte financier instable, le modèle économique fondé sur la dette LBO ou la capitalisation boursière peut s’effondrer du jour au lendemain. Des situations insolubles deviennent alors prégnantes : comment assurer la continuité de l’activité de soins lorsque la valeur disparait? Nationaliser pour éponger les pertes et sauvegarder l’activité, comme proposé par un sénateur dans le cadre de l’affaire ORPEA, qui a perdu 73% de sa capitalisation boursière depuis le 1er janvier 2022 ?

La biologie médicale est aujourd’hui solide financièrement, grâce au milliard engrangé par la crise Covid. Les laboratoires en LBO les plus endettés vont devoir néanmoins affronter un challenge de taille : la remontée des taux dans un contexte d’inflation. La pire des situations lorsque les tarifs sont bloqués voire amenés à être réévalués à la baisse au travers d’un nouveau protocole d’accord avec la CNAM. La dette arrivant à échéance sera refinancée aux conditions du marché, avec des taux d’intérêts dégradant de façon majeure les bilans. De nombreuses tensions sociales liées à la dévaluation des salaires face à l’inflation sont également à redouter. Dans ce contexte, il n’y aura pas énormément de solution : couper dans les dépenses et investissements, le cœur de métier de la biologie : des professionnels assez nombreux et compétents pilotant des plateformes techniques performantes. Les grands groupes se préparent déjà au choc frontal : transfert des sites les moins rentables, révision des tournées/acheminement des prélèvements des campagnes les plus reculées, diversification de l’activité (notamment à l’international), émergence de la biologie « fake-med », investissement dans les technologies de demain, qui pour l’heure sont très onéreuses et ne sont pas financées par l’Assurance Maladie…

Conclusion

A ce jour, compte tenu de la variété et de la complexité infinies des montages juridiques auxquels des sociétés peuvent recourir dans le cadre de prises de contrôle indirectes ou dissimulées d’autres sociétés, les risques sont très importants de voir les professionnels de santé être subordonnés à une logique purement économique ou commerciale sans qu’aucun organisme tiers ne puisse en assurer efficacement le contrôle ou la sanction. Défendre le principe du contrôle réel du laboratoire de biologie médicale par les biologistes médicaux exerçants est donc plus que jamais un combat pertinent pour le bien des patients et de la santé publique, réflexion que l’on peut étendre dès maintenant à l’ensemble des structures exerçant une activité de santé.

On peut être convaincu qu’à ce jour, l’exercice libéral en était le seul garant et la solution la plus efficiente. Mais aujourd’hui, force est de constater qu’une dynamique délétère s’est installée. Un groupement de laboratoires qui jadis s’enorgueillissait d’être devenu le 1er groupe libéral de biologistes médicaux détenant 100% de capital a ouvert son capital au bout de seulement quelques années d’existence à un fonds d’investissement pour dixit « mieux intégrer des jeunes biologistes au capital ». Par un mécanisme bien connu de dilution de l’actionnariat ?

L’Etat gagnerait à ne pas faire l’économie d’une réflexion sincère et impartiale avec l’objectif d’anticiper et prévenir les risques précédemment cités.

Compter sur une déontologie professionnelle individuelle dans un cadre aussi financiarisé, sur des Ordres ou syndicats professionnels en passe d’être noyautés par des représentants mécaniquement de plus en plus en exercice dans des groupes financiers, sur des labels ou des hypothétiques audits de complaisance relève de la pure incantation. Par-delà les débats philosophiques sur la « financiarisation » versus le « projet social » de nos entreprises de santé se pose solennellement l’incompatibilité par nature entre objectifs de court et de long terme. Et le mécanisme du LBO consistant à endetter la cible pour dégager du profit avant de revendre la société à un autre fond, en faisant monter le prix des actifs et l’endettement au-delà de tout sens économique raisonnable devrait clore le débat, si tenté qu’il puisse encore y en avoir un.

« Les sociétés d’exercice libéral (SEL) présentent la caractéristique d’être liées
de manière très étroite aux associés qui exercent en leur sein. C’est un des éléments permettant d’écarter le risque d’une prise de contrôle extérieure et de garantir leur indépendance »

Conclusions de M. Thiellay, Conseil d’État, section, 7 avril 2010, n° 322.305

Le gouvernement dispose d’une fenêtre législative pour sauvegarder l’esprit des SEL pensé jadis par le législateur, réduire l’attractivité du secteur de la santé pour les fonds activistes qui continuent de lever des liquidités records de par le monde en imposant une gouvernance éthique et respectueux des engagements de santé publique.

Il doit la saisir maintenant, avec courage et détermination.

Edit 09/2023

Seule disposition qui a résisté à la lutte armée de cabinets d’avocat d’affaire, l’article 44 qui prévoit que chaque société déclare tous les ans à l’Ordre professionnel dont elle relève, les modifications de gouvernance (composition du capital, des droits de vote, clauses sur l’organisation et les pouvoirs, y compris occultes). Mais il n’est pas prévu d’information sur les droits financiers et décisionnels détenus par les associés non professionnels dans la version définitive de l’ordonnance, privant les ordres professionnels d’une vision complète des pouvoirs au sein des sociétés d’exercice.

Les éléments concernant le cadrage des droits financiers et des droits décisionnels ou encore la possibilité de réserver la détention des actions de préférence aux seuls professionnels en exercice n’ont pas perduré jusqu’au texte définitif.

Enfin, les notions d’ « organe professionnel » et de « principe d’indépendance », qui avaient étaient définies dans le projet d’ordonnance, ont disparu également de la version définitive, ce dont on peut s’étonner alors que l’indépendance professionnelle devait être au centre du projet de loi.

Finalement, l’indépendance effective de l’exercice en SEL pour les professionnels de santé est renvoyée à des décrets idoines en Conseil d’Etat (jamais sortis en 10 ans pour la biologie) pour les règles de détention de la majorité du capital par des professionnels autres qu’exerçants, détention d’une quote-part du capital et des droits de vote par des « tiers » et le nombre de participations, directes ou indirectes, détenu par un même associé.

Statut quo ou presque.

Ceci est également à mettre en parallèle avec la modification dans le même temps d’une doctrine administrative et fiscale sur l’imposition des associés professionnels exerçant au sein des SEL. Une décision du 15/12/2022 tant inattendue que soudaine, vient modifier une règle en vigueur depuis 1996 et d’application quasi immédiate, même si un report d’un an a été consenti pour la mise en conformité. Chaque associé professionnel va devoir établir une déclaration individuelle de BNC, ce qui semble aberrant du fait de l’essence même des SEL qui est l’exercice en commun. C’est le choix de la structure juridique d’exploitation qui devrait continuer à qualifier le régime fiscal et social de l’associé et non pas la seule activité exercée par la société. Cette rupture va induire une inégalité majeure de traitement entre les libéraux et les autres professions et risque de signer la mort des SEL, outil de transmission et d’intégration des jeunes libéraux, avec un risque de transfert vers les sociétés de droit commun.

10 commentaires sur « Actions de préférence : le mirage de l’article 52 de l’Ordonnance sur l’indépendance professionnelle des professions réglementées  »

  1. Bonjour, nous sommes plusieurs vétérinaires à nous poser des questions et à tenter de garder le capital dans les mains des professionnels, si possible en exercice. Y a t’il du nouveau depuis votre article? Nos instances sont peu locales, probablement du fait des tensions juridiques. Plusieurs structures ont été rayées de l’ordre mais exercent encore car l’ordre ne fait pas appliquer ses décision par peur de coûts exorbitants si ses décisions sont infirmées en conseil d’état ou devant la juridiction européenne.
    Merci

    J’aime

    1. Bonjour, non, c’est le black out total, aucun nouveau élément à apporter de plus que ce que déjà rédigé mais je ne manquerais pas de compléter à la suite de l’article.

      J’aime

  2. le pb est que la rentabilité des labo est bien trop importante au regard du travail du biologiste, comparé à celui d’autres spécialités médicales comme la chirurgie – et ne parlons pas des tombées de cash du covid – c’est bien pour cela que dans la bio tout se termine toujours par le sujet du fric; que chacun bascule et notamment ceux qui m’ont juré qu’ils ne passeraient jamais à l’ennemi

    J’aime

    1. Non, je ne pense pas que le problème de fond soit la rentabilité supposée trop élevée par rapport à d’autres spécialités médicales.
      1/ Les biologistes médicaux ne sont pas les seuls vendeurs de parts de PME/ETI qui sont sur-valorisés dans le contexte actuel
      2/ On ne peut pas comparer un chirurgien qui touche des honoraires (et encaisse des dépassements) avec une spécialité à plateau technique, une responsabilité de gérance de société avec des salariés. Dans les cliniques privés, le chirurgien peut conserver une rémunération attractive, sa patientèle, ce qui n’est pas le cas des biologistes médicaux qui deviennent des pseudo-salariés avec un niveau d’étude bac+10. Que vous ne sachiez pas ce que recouvre le travail de biologiste médical dans l’organisation française des soins est une autre question.
      3/ Certains biologistes ont basculé dès le début, à prix d’amis, malgré la rentabilité déjà élevée il y 15 ans, convaincus que le modèle intégré financier était l’avenir.
      La seule vraie question reste : comment diminuer cette attractivité pour des fonds qui vont venir faire du LBO, conduisant in fine à un risque réel de tension financière : refinancement de la dette, investissement, rémunération des collaborateurs avec un risque de chute d’attractivité, y compris dans le rang des biologistes. Tout cela avec une marge de manœuvre limitée dans un pays où les prix sont bloqués et le reste à charge pour le patient devant être le plus bas possible. Peu d’options : réduire l’attractivité fiscale pour le Private Equity ou levier juridique via la restriction du recours au démembrement de parts.
      Enfin, pour prendre un exemple adjacent : Galileo Global Education, 1er groupe d’enseignement post secondaire privé français avec 500 millions de CA a été valorisé pour un LBO (seulement « bis ») à 2.3 milliards d’euros… la marge opérationnelle est de 32% avec une tarification des frais de scolarité conservant une large marge de manoeuvre. Qui vient de racheter ? Téthys, le holding des Bettencourt-Meyers, l’office canadien de gestion des pensions CPPIB et…BPI. Peu ou prou les mêmes investisseurs des laboratoires et cliniques privés. Argent facile de la BCE et liquidités à investir, avec de l’optimisation fiscale à gogo. Bref, c’est une vraie tendance de fond, qui est encouragée au plus haut niveau de l’Etat depuis des années sur fond de globalisation, libre concurrence et libre circulation des capitaux. Pointer du doigt les biologistes qui individuellement font le choix de vendre dans ce contexte me parait être vraiment très réducteur !

      J’aime

  3. Article très intéressant comme toujours Mais surtout assez fataliste pour les nouveaux biologiste medicaux quand je lis ca j’hésite de plus en plus à choisir cette spécialité

    Envoyé de mon iPhone

    >

    J’aime

    1. Merci de votre intérêt. Je ne trouve pas cet article fataliste, il y a toujours de l’espoir pour les clairvoyants. Il est possible de commenter de manière anonyme sur chacun des articles et si aucun biologiste actuellement en exercice au sein de groupe financier ne vient apporter sont témoignage suite à cet article, nous pourrions en conclure qu’il y fait peut être bon vivre finalement !

      J’aime

      1. Bonjour
        En tant que « presque jeune » biologiste (36 ans), TNS 1 part depuis bientôt 9 ans dans un LBM qui a été racheté 3 fois entre temps pour finir par un « grand » groupe, je ne suis pas sûr de pouvoir témoigner qu’il fait bon y vivre…
        J’ai vu mon activité et mes responsabilités augmenter les premières années, pour finalement les voir fondre comme neige au soleil suite à l’intégration d’un « moyen » puis « grand groupe » ces 3 dernières année, pour me retrouver comme vous dites un « pseudo salarié bac+9 » sans aucun pouvoir décisionnel ni aucune perspective d’évolution de carrière, sans parler de la différence de rémunération à travail équivalent avec les autres jeunes qui ont eu la chance de pouvoir accéder à des LBO voire de s’associer un extremis. Soyons honnête, on peut très bien y trouver son compte car du fait de se retrouver « pseudo salarié » on bosse sûrement moins que si on était patron de son propre labo! Mais pas sûr que ça compense la frustration du reste… et qu’en sera-t-il quand le lobbying de ces grands groupes réussira à faire sauter le n site ´ bio et qu’il faudra gérer 5 sites par bio en même temps ?
        Bref pour ma part, si c’était à refaire je choisirais une autre voie.

        J’aime

      2. Bonjour, merci pour ce retour, mon appel à témoignage à peine déguisé ne rencontre pas un énorme succès malgré l’importante fréquentation du site, ce qui est surprenant. Résignation ? Je pense à titre personnel que lorsqu’il faudra trop gérer de validation et de sites en même temps pour un salaire absolument pas à la hauteur du niveau d’étude et de compétence des biologistes médicaux, le déficit d’attractivité sera tel qu’il deviendra impossible de recruter des biologistes en secteur libéral privé. Cela a déjà commencé. Ce sera l’occasion d’évoluer vers de nouveaux corps de métier intermédiaires et s’appuyer à fond sur ce qu’il restera des biologistes associés encore accrochés à leur participation, s’ils n’ont pas négocié leurs sorties entre temps. On sait que le système de santé souffre avant toute chose d’une crise des vocations. La France fait le choix assez inédit de financiariser tout en appliquant l’austérité, un cocktail pour le moins détonnant dont nous tarderons pas de voir les effets à long terme. Bon courage…

        J’aime

Répondre à BioW Annuler la réponse.